Projet de loi de finances : le début des enchères ?

Actualités & Presse

Patrimoine 12/11/2024

Projet de loi de finances : le début des enchères ?

ODDO BHF3 Minutes

 

Laure-varastet.png

Laure Varastet
Ingénieur Patrimonial


Le projet de loi de finances pour 2025 a été présenté en Conseil des Ministres le 10 octobre dernier.

Par le jeu de nombreux amendements, la commission des finances puis l'Assemblée nationale ont profondément modifié, voir dénaturé le texte initial. En revanche, faute d'accord (l'Assemblée nationale a rejeté le texte largement amendé le 12 novembre dernier), c'est le texte d'origine qui va être analysé par les sénateurs prochainement.

Mesures impactant la fiscalité des particuliers : à quoi doit-on s'attendre ?

Le texte initial n'incluait que peu de mesures impactant les particuliers, hormis la contribution différentielle qui vous est présentée dans un autre article. Nous vous présentons ci-après les principales mesures du projet initial, ainsi que quelques amendements initialement adoptés (non exhaustifs).

Evolution du barème 

Pour neutraliser l'impact de l'inflation sur la fiscalité des contribuables, les tranches du barème de l'impôt sur le revenu seraient revalorisées de 2%. Il en serait de même pour les grilles de taux de PAS (Prélèvement à la Source).

BSA (Bons de Souscription en Actions) & BSPCE (Bons de Souscription de Parts de Créateur d'Entreprise)

Afin de contrarier des décisions récentes du Conseil d'Etat, le projet de loi prévoit de préciser le sort de l'exercice de tels bons dans le cadre de PEA ou PEA-PME : la mesure réinstaurerait donc l'impossibilité de l'exercice de ces bons à partir de liquidités présentes dans ces plans. Attention, cette mesure, si elle est bien votée sans modification, s'appliquerait aux opérations dès le 10 octobre 2024. 

Par ailleurs, toujours dans la poursuite de la prise en compte des jurisprudences récentes, les opérations d'apport de titres issus de l'exercice de BSPCE emporteraient bien un sursis ou un report d'imposition de l'impôt relatif à la plus-value attachée à ces titres (résultant de la différence entre le prix de cession et le prix au jour de l'exercice des bons). En revanche, le gain matérialisé au jour de l'exercice du bon (obtenu par la différence du prix au jour de l'exercice du bon minoré du prix acquitté pour son exercice), serait imposable entre les mains de l'apporteur au titre de l'année de l'apport, selon le régime spécifique des gains d'exercice ou de cession des BSPCE (soit 12,8% ou 30% selon l'ancienneté du titulaire des titres ainsi obtenus dans la société, majoré des prélèvements sociaux).

Mesures introduites par voie d'amendement

En ce qui concerne les plus-values immobilières :

Le projet de loi introduirait une condition liant exonération de la plus-value de cession de la résidence principale à une détention de 5 ans minimum (sauf motif impérieux !).

Par ailleurs, toujours en matière de plus-value, la suppression des abattements pour durée de détention serait remplacée par une actualisation de la valeur d'acquisition du bien en fonction de l'inflation… et le taux d'imposition serait porté de 19% à 30% (auquel viendraient s'ajouter les prélèvements sociaux ).

Ces mesures viendraient en complément de celles inclues dans la loi Le Meur enfin adoptée (le 7 novembre dernier) et instaurant une harmonisation des dispositifs entre locations nues et locations meublées au regard de l'imposition des revenus des locations. Une des mesures reprise dans le projet de loi est la majoration de l'abattement applicable dans le régime micro-foncier à 50% du revenu brut (versus 30% actuellement).

En matière de plus-values sur titres

Une mesure concernant le régime dit de « l'apport cession » toucherait les obligations de remploi qui conditionnent le maintien du report d'imposition obtenu dans le cadre d'opérations d'apport de titres à une société holding contrôlée par l'apporteur, préalablement créée avant la cession des titres (aussi également nommées 150-0 B ter du Code Général des Impôts). En effet, le projet de loi prévoit que les activités de gestion de biens immobiliers hôteliers seraient exclues, comme le sont déjà les opérations de gestion de son patrimoine immobilier. Cela intègre-t-il également les activités de marchands de biens ? Ce champ d'activité serait touché par l'ajout d'un nouvel évènement entrainant la fin du report d'imposition : les opérations d'acquisition d'un ensemble immobilier et de revente par lot quand la marge brute de l'opération dépasserait 2%... Nous attendons les précisions !

Enfin, l'Exit Tax devrait être renforcé par un retour en arrière avec un dégrèvement obtenu au terme de 15 ans suivant le départ de France versus 2 ou 5 ans actuellement.

En matière de donation / succession

Le Pacte Dutreil, initialement exclu du projet de loi, serait recentré pour ne concerner que la quote-part de biens affectés à l'activité opérationnelle de la société. Il se verrait également modifié indirectement au moment de la cession des titres : le calcul de la plus-value serait impacté en cas de cession avant 8 ans de détention post transmission en réintégrant dans le calcul de la plus-value l'avantage de l'abattement de 75% applicable pour le calcul des droits de mutation. Cette mesure entrainerait naturellement un allongement de la durée de conservation des titres. 

En revanche l'abattement applicable aux transmissions en ligne directe serait porté de 100K€ à 120K€.

Et maintenant ?

L'Assemblée nationale a donc rejeté le texte ainsi examiné ces dernières semaines.

C'est donc bien le texte déposé initialement qui sera étudié par les sénateurs, à compter du 18 novembre. Espérons que le vote solennel de la loi pourra avoir lieu comme prévu, le 12 décembre prochain et qu'il aura été mis fin à la surenchère, si non gare au ras-le -bol fiscal ! 

Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l'avancée des discussions.

Partager

Nos actualités

Exceptionnalisme européen Point marchés 11/12/2024

Exceptionnalisme européen

La divergence entre les États-Unis et l’Europe devrait se poursuivre en 2025, et en particulier la tendance à l’œuvre depuis plusieurs trimestres à savoir « l’exceptionnalisme américain ». En termes de performance absolue, le S&P 500 a enregistré fin novembre son 60e record de clôture de l’année. La performance relative des actions américaines est encore plus remarquable.

Une année riche en incertitudes pour les investisseurs Point marchés 11/12/2024

Une année riche en incertitudes pour les investisseurs

Les risques politiques se sont accumulés de manière inhabituelle partout dans le monde au cours de l’année qui s’achève. Et l’année à venir ne devrait pas enregistrer de diminution des incertitudes géopolitiques et géoéconomiques.

Les enjeux de politique économique du prochain gouvernement fédéral Point marchés 18/11/2024

Les enjeux de politique économique du prochain gouvernement fédéral

Les nouvelles élections en Allemagne et une possible réorientation politique ne changeront probablement pas fondamentalement la situation difficile de l'économie allemande du jour au lendemain. Les changements structurels demandent du temps.