Jérôme Chigard
Directeur de l'Ingénierie Patrimoniale
Alors que le vote d'un budget d'ici la fin de l'année apparait de plus en plus incertain, le Gouvernement peine plus qu'attendu à rassembler une majorité. Son projet de loi de finances, bien que peu fourni en mesures concernant les particuliers n'a pas manqué de susciter des débats nourris et une multitude d'amendements.
Débat budgétaire : la surenchère !
Mesure phare de justice du projet de loi de finances du Gouvernement Barnier confronté à une dégradation inattendue des comptes publics, la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) doit participer au redressement des finances françaises. Cet effort demandé aux mieux lotis sera « temporaire » toutefois comme le veut l'adage, les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent.
Mais de quoi s'agit-il ?
Comme son nom l'indique, il s'agit d'une imposition complémentaire. Ainsi, dès lors que le taux moyen d'imposition « ajusté » au titre de l'impôt sur le revenu et de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) sera inférieur à 20 % du revenu fiscal de référence (RFR) « ajusté », une contribution différentielle sera appliquée pour atteindre ce niveau minimum d'imposition.
Selon la présentation du gouvernement, ce dispositif s'appliquerait aux contribuables assujettis à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), à savoir ceux dont le revenu fiscal de référence dépasse 250 000 € pour un célibataire et 500 000 € pour un couple, et dont le taux moyen d'imposition est inférieur à 20 %. Afin d'atténuer l'effet de seuil lié à l'entrée dans le champ de cette nouvelle contribution, un mécanisme de décote serait prévu. Elle ne concernerait « que » quelques dizaines de milliers de foyers aux revenus les plus élevés et n'affecterait aucun foyer non imposable. Cette mesure de justice fiscale correspond à un effort ciblé sur les foyers aux revenus élevés qui, notamment par un recours soutenu aux dispositifs fiscaux dérogatoires, voient leur taux effectif d'imposition diminuer.
Son rendement attendu est estimé à 2 Md€ et elle s'appliquerait à compter de l'imposition des revenus de l'année 2024 et jusqu'à l'imposition des revenus de l'année 2026 afin d'accompagner la trajectoire de redressement des comptes publics.
Soumis à l'examen des membres de la Commission des finances de l'Assemblée nationale l'article 3 du projet de loi de finances à fait l'objet de multiples amendements mais avant d'entrer dans le détail permettons-nous de souligner deux particularités :
- D'une part, cet article a été l'occasion pour la plupart des élus de découvrir l'existence de la CEHR qui fête cette année ses 12 ans. Belle performance pour une imposition exceptionnelle ! Rappelons que le terme « exceptionnel » avait à l'époque été choisi car la CEHR devait disparaitre dès lors que le déficit budgétaire de la France aurait été ramené à 3% du PIB. Cet objectif n'a jamais été atteint depuis…
- D'autre part, les prélèvements sociaux dont le taux global s'élève à 17,2% aujourd'hui ne sont pas pris en compte bien que n'octroyant aucune contrepartie en matière sociale et étant habituellement pris en compte pour les dispositifs de plafonnement (bouclier fiscal, plafonnement de l'IFI, etc…). En toute justice, le taux de 20% est dans l'écrasante majorité des cas largement dépassé (jusqu'à 34% pour les revenus de capitaux mobiliers) pour peu que l'on tienne compte des divers prélèvements sociaux que l'administration qualifie elle-même d'impositions !
Les conséquences de cette approche biaisée, même si elle était pavée de bonnes intentions, se retrouve dans le déluge d'amendements qui, de bonne foi ou non, prétendent améliorer le dispositif. En effet, annoncer un taux minimum de 20% fait figure de faux semblant de taxation des riches pour la gauche. Alors, certains députés proposent sa pérennisation avant d'envisager, par d'autres aménagements techniques, sa majoration. Un avatar du fameux double effet KissCool !
D'autres, issus du centre proposent ni plus ni moins que de reprendre par les modalités de calcul de la contribution, les réductions et crédits d'impôt obtenus en vertu de la loi. Le Conseil constitutionnel devrait s'en émouvoir, lui qui a déjà sanctionné ce genre de remise en cause a posteriori.
D'autres encore ont proposé une modification du système de décote et un ajustement à la baisse de l'impôt à prendre en compte, une uniformisation du revenu fiscal de référence avec celui de la CEHR ou la suppression du rehaussement de l'IR prévu initialement le tout pour maximiser le rendement de la nouvelle contribution.
Un florilège d'idées pour faire payer plus en y comprenant rien... jusqu'à l'overdose du ras le bol fiscal.
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