Les conséquences économiques de Donald Trump

Actualités & Presse

Perspective économique 13/11/2024

Les conséquences économiques de Donald Trump

ODDO BHF5 Minutes

Bruno Cavalier – Chef économiste ODDO BHF

 

 

 

POINTS CLÉS :

  • Donald Trump va revenir à la Maison Blanche bien mieux préparé qu’il y a huit ans.
  • Afin de stimuler la croissance US, il affirme vouloir des taux d’intérêt plus bas et un dollar faible.
  • Mais sa plateforme économique a tout pour conduire à un résultat diamétralement opposé.
  • Deux risques sont à surveiller de près. Primo, une remise en cause de l’indépendance de la Fed. Secundo, les hausses de droits de douane, un choc potentiellement dévastateur pour l’Europe

 

Le choc d’inflation intervenu sous la présidence de Joe Biden a pesé lourd dans le discrédit subi par le camp démocrate lors des élections américaines du 5 novembre. Sur les quatre dernières années, l’inflation s’est établie à 5% par an en moyenne, avec une pointe à près de 9%. C’est plus du double de la tendance normale des dernières décennies. En conséquence, les électeurs ont en majorité choisi le camp républicain, assurant une large victoire à Donald Trump. Le paradoxe de ce choix est que sa plateforme économique est à première vue la plus inflationniste. 

Au plan économique, les grandes idées de Donald Trump sont les mêmes qu’il y a huit ans, mais cette fois, il est mieux préparé pour les mettre en œuvre. En 2016, sa victoire avait surpris jusqu’à son équipe de campagne qui n’avait aucun plan pour former le futur gouvernement. Donald Trump s’était présenté comme un candidat hors « système » mais les principaux postes de son administration avaient échu à des Républicains traditionnels. Cela faisait contrepoids aux idées parfois radicales du 45ème président des Etats-Unis. En 2024, la situation est toute différente. Donald Trump a refaçonné le parti républicain à sa main et l’a amené à la victoire, ce qui crée des liens de dépendance parmi les nouveaux élus. Les premières nominations du futur 47ème président montrent qu’il entend s’entourer de personnes loyales et alignées sur ses vues. Cela n’exclut pas la compétence mais ce n’est pas certain dans tous les domaines.

 

Autre différence majeure, Donald Trump a gagné avec une marge confortable, obtenant 58% des voix du Collège électoral, sans le moindre soupçon de fraude ou d’ingérence étrangère. Cela lui donne une plus grande légitimité. Il a gagné le vote populaire. Tous ses ennuis judiciaires vont d’un coup être oubliés. D’importants think-tanks ont travaillé ces derniers mois dans son orbite et il peut compter sur de puissants relais à Wall Street et, via Elon Musk, dans les secteurs de pointe. Les Républicains ont aussi repris la majorité au Sénat. Leurs vues sont très bien représentées à la Cour Suprême.

 

En somme, jusqu’aux prochaines élections de mi-mandat fin 2026, il y a peu d’obstacles pouvant empêcher Donald Trump de mettre en œuvre son programme. Le principal frein pourrait venir des marchés financiers s’ils en venaient à la conclusion que cette politique causera plus de problèmes que de bénéfices. 

 

Lors de son premier mandat, les réalisations de Donald Trump ont été nombreuses, même si elles ont souvent été obscurcies par ses excès et de fortes tensions politiques (deux procédures pour destitution). Les deux années suivantes ont surtout été consacrées à la guerre tarifaire avec la Chine et la refonte de l’accord de libre-échange nord-américain. En 2020, l’administration Trump a très tôt lancé un vaste partenariat public-privé pour développer, produire et distribuer un vaccin anti-Covid. 

 

A l’occasion de la pandémie, le déficit budgétaire s’est fortement accru. Concernant les affaires intérieures, des barrières visant à empêcher l’immigration illégale à la frontière mexicaine ont été construites, sans grand succès. Il est notable enfin qu’aucune grande opération militaire extérieure n’a été lancée.

 

Quelles sont les priorités de Donald Trump pour son second mandat ? On peut dire à gros traits qu’elles prolongent en les amplifiant les grandes lignes de la politique menée lors du premier mandat.

  • Sur les questions économiques et budgétaires, les objectifs fixés sont l’extension des baisses d’impôt arrivant à expiration à la fin 2025, de nouvelles baisses d’impôt, en particulier pour les sociétés, ainsi que des mesures de déréglementation et de désengagement de l’Etat fédéral.
  • En matière commerciale, Trump prévoit une forte élévation des droits de douane sur l’ensemble des importations de produits étrangers ainsi que l’intensification des restrictions technologiques contre la Chine. Pour la zone euro, qui dégage près de 200 milliards de dollars d’excédents commerciaux vis-à-vis des Etats-Unis, c’est une menace directe pour sa croissance (graphe). Un tel choc serait surtout dommageable pour l’Allemagne, un pays à la fois très ouvert au commerce international et fortement dépendant des marchés américains. Ces dernières années, l’Allemagne a en effet compensé le repli de ses exportations vers la Chine par une hausse des ventes aux Etats-Unis.
  • En matière migratoire, Trump envisage l’expulsion massive des travailleurs clandestins.
  • Concernant les questions géopolitiques, Trump désire peser de toute son influence pour aboutir au règlement rapide des conflits en cours en Ukraine et au Moyen-Orient

 

Donald Trump commencera son mandat avec une économie solide. Le taux de chômage est bas, de même que le taux d’épargne des ménages. Les prix d’actifs sont élevés. L’inflation est presque rentrée dans le rang après plusieurs années de dérive. Ce n’est pas une économie réclamant de fortes mesures reflationnistes. Le programme de Trump pousse pourtant en ce sens par divers canaux.

 

Primo, les mesures fiscales pourraient accroître le déficit du budget fédéral de l’ordre de 1.5 point de PIB par an sur la prochaine décennie. En 2024, ce déficit avoisinait déjà 6.5% du PIB. Secundo, les restrictions des flux migratoires causeraient des pénuries de main-d’œuvre, comme après la sortie du confinement. Il en avait alors résulté des tensions salariales. Enfin, la hausse des droits de douane élèverait le niveau des prix. On peut certes rêver, comme le fait Trump, que les exportateurs absorberont le surcoût dans leurs marges mais l’expérience historique montre que la facture incombe en fait au consommateur final. Il y aurait de quoi perdre de futures élections. 

 

Rien de tout cela en tout cas ne serait de nature à encourager la banque centrale à assouplir sa politique monétaire. La Réserve fédérale a baissé deux fois ses taux directeurs ces derniers mois, mais reste prudente pour la suite. Elle dit attendre de voir quelles mesures seront effectivement mises en œuvre avant de décider si cela réclame une réaction de politique monétaire. Pour compliquer les choses, Donald Trump n’a jamais caché qu’il ne voyait pas l’indépendance de la Fed d’un bon œil. C’est là pourtant un des principes tenus pour essentiels par les investisseurs. Toute tentative d’interférence dans les décisions de la banque centrale serait déstabilisatrice. Le président de la Fed a rappelé que la loi ne permettait pas qu’on le limoge et qu’il entendait bien rester à son poste jusqu’à la fin de son mandat en mai 2026. 

 

En somme, on ne doute pas que Donald Trump veuille appliquer son programme. Il en a les moyens. Ce qui pourrait l’amener à certains accommodements est que sa politique visant à stimuler la croissance risque surtout de raviver l’inflation. Les conséquences iraient alors à rebours de ce qu’il souhaite, à savoir des taux d’intérêt plus bas et un dollar plus faible. 

DEFICIT COMMERCIAL US VIS-A-VIS DE L'EUROPE




 

 

 

 

Disclaimer

Ce document a été préparé par ODDO BHF dans un but purement informatif. Il ne saurait créer de quelconques obligations à charge de ODDO BHF.  Les opinions émises dans ce document correspondent aux anticipations de marché de ODDO BHF au moment de la publication de document. Elles sont susceptibles d’évoluer en fonction des conditions de marché et ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité contractuelle de ODDO BHF. Toute référence à des valeurs individuelles a été incluse à des fins d'illustration uniquement. Avant d'investir dans une quelconque classe d'actifs, il est fortement recommandé à l'investisseur potentiel de s'enquérir de manière détaillée des risques auxquels ces classes d'actifs sont exposées notamment le risque de perte en capital.

ODDO BHF 

12, boulevard de la Madeleine – 75440 Paris Cedex 09 France – Tél. : 33(0)1 44 51 85 00 – Fax : 33(0)1 44 51 85 10 – 

www.oddo-bhf.com ODDO BHF SCA, société en commandite par actions au capital de 70 000 000 € – RCS 652 027 384 Paris – agréée 

en qualité d’établissement de crédit par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) et immatriculée à l’ORIAS en

 qualité de courtier d’assurance sous le numéro 08046444. - www.oddo-bhf.com


Partager

Nos actualités

Les conséquences économiques de Donald Trump Perspective économique 13/11/2024

Les conséquences économiques de Donald Trump

On ne doute pas que Donald Trump veuille appliquer son programme. Il en a les moyens. Ce qui pourrait l’amener à certains accommodements est que sa politique visant à stimuler la croissance risque surtout de raviver l’inflation.

Make America Trump again Point marchés 12/11/2024

Make America Trump again

Les élections américaines se soldent par une victoire probablement totale des Républicains, c’est-à-dire que le parti devrait contrôler à la fois la Maison blanche, le Sénat et la Chambre des Représentants.

Europe recherche croissance désespérément Perspective économique 16/10/2024

Europe recherche croissance désespérément

En 2022 et 2023, l’économie européenne a survécu au triple choc de la crise gazière, de l’envolée des prix à la consommation et du durcissement inédit des taux d’intérêt. Au début de cette année, les pièces semblaient se mettre en place pour que la zone euro enclenche enfin une reprise.