Présent d’usage : défiscaliser vos cadeaux ?
Les fêtes de fin d’année et leur lot de réjouissances et de surprises approchent à grands pas. Cette période, propice à la générosité, est l’occasion de rappeler les contours du présent d’usage et de ses avantages par rapport à une donation classique.
Qu’est-ce qu’un présent d’usage ?
Le Code civil ne définit pas précisément le présent d’usage, il en fait seulement référence dans son article 852. Il convient alors de se tourner vers la doctrine administrative et la jurisprudence pour en appréhender les contours : il s’agit de « cadeaux faits à l’occasion de certains évènements, conformément à l’usage, et n’excédant pas une certaine valeur1».
Ainsi, le présent d’usage peut prendre différentes formes (par exemple une somme d’argent, un bijou, un tableau, etc.) et doit cumuler deux critères :
– Être offert à l’occasion d’un évènement particulier, pour lequel l’usage suppose un cadeau.
Par exemple Noël, un anniversaire, une remise de diplôme, des fiançailles, un mariage, une naissance, un départ en retraite, etc.
– Et avoir une valeur modique par rapport à la situation de fortune actuelle de l’offrant.
A ce jour, l’administration fiscale n’a fixé aucune règle de proportionnalité du présent avec le patrimoine ou les revenus du donateur. Elle apprécie au cas par cas, en fonction de l’ensemble des circonstances de fait et sous le contrôle des juges de fond. Par exemple, ces derniers ont pu confirmer la qualification de présent d’usage lorsque les sommes données n’excédaient pas 2 à 3% du patrimoine du donateur2. Néanmoins, ces décisions d’espèce rendues en considération des circonstances particulières entourant le cadeau ne permettent pas d’en retenir une règle de principe.
Par ailleurs, le Code civil précise que le caractère de présent d’usage s’apprécie à la date où il est consenti. Par exemple, huit aquarelles de Pierre-Joseph Redouté évaluées à environ 857 000 € dix ans après avoir été offertes par un père à sa fille à l’occasion de son mariage ont été retenues comme présent d’usage, car leur valeur estimée au moment du mariage était d’environ 10 000 € et en rapport avec la fortune du père3.
Quelles sont les conséquences du présent d’usage ?
Le présent d’usage n’est pas considéré comme une donation au sens juridique et fiscal. Ainsi, il ne consomme pas les abattements éventuellement disponibles en fonction du lien de parenté entre le donateur et le donataire et il n’est pas imposable aux droits de donation. Par ailleurs, il ne fait pas l’objet d’un rapport civil et fiscal à la succession.
Plaisir d’offrir et de recevoir !
Comment faire un présent d’usage ?
S’il n’y a pas de formalité particulière à respecter, il est préférable de se constituer la preuve que ce cadeau est fait dans l’esprit d’un présent d’usage. Par exemple, il est conseillé de conserver un écrit précisant la date, l’évènement / le motif du cadeau ainsi que la ou les personnes gratifiées.
Enfin, qu’est-ce qui différencie le présent d’usage d’un don hors fiscalité ?
Un cadeau qui ne répond pas aux conditions du présent d’usage est alors qualifié de don. En dessous d’un certain seuil, celui-ci n’est pas taxé. Par exemple, la loi prévoit actuellement, en franchise d’impôt et renouvelable tous les 15 ans que :
• Chaque parent peut offrir à chaque enfant une valeur de 100 000 €.
• Chaque grand-parent peut donner à chaque petit enfant un présent de 31 865 €.
• Chaque arrière grand-parent peut offrir à chaque membre de la dernière génération (arrière-petits-enfants) une valeur de 5 310 €.
Au-delà de ces abattements en ligne directe, une fiscalité progressive s’applique.
Ces dons classiques sont à distinguer des dons familiaux de sommes d’argent (aussi connus sous l’appellation dons Sarkozy), pour lesquels un second abattement se cumule. En effet, un parent, grand-parent, arrière grand-parent ou encore un oncle ou tante (en l’absence de descendance) de moins de 80 ans, peut consentir tous les 15 ans un don d’argent de 31 865 € à chacun des enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants, neveux ou nièces (en l’absence de descendance) de plus de 18 ans ; là encore en totale franchise de droits.
Par ailleurs, ces dons4 feront l’objet d’un rapport civil au décès du donateur. C’est-à-dire qu’ils seront réintégrés fictivement au patrimoine du défunt afin de s’assurer qu’ils n’entament pas la part d’héritage revenant de droit aux héritiers réservataires.
En définitive, le présent d’usage est avant tout un témoignage d’affection familiale ou amicale, pour un évènement particulier. Il n’a pas pour objectif de privilégier une personne ou de transmettre à moindre coût.
Notre équipe d’ingénieurs patrimoniaux souhaite de très bonnes fêtes de fin d’année à tous les heureux donataires et généreux donateurs qui sauront manier le présent d’usage avec raison !
1 Cass. 1e civ, arrêt du 6 décembre 1988, n°87-15083
2 Exemples de jurisprudences : CA Orléans, 11 octobre 2007, n° 06-3246, CA Paris , 1re ch., 11 avr. 2002 , n° 2001/03791
3 Cass.1e civ. 10 mai 1995, n° 93-15.187
4 Sont exclus du rapport civil les dons faits hors part successorale, les donations-partages et comme indiqué les présents d’usage.
Ingénieur Patrimonial
Rédigé le 19 décembre 2023