Haro sur la location en meublé

Patrimoine
11.23.2023
3 Minutes

La location meublée est soumise à rude épreuve entre rapports défavorables et tentatives de réforme. Une refonte de la fiscalité des revenus locatifs est-elle possible ? 

A l’heure où les statistiques témoignent d’un marché locatif bloqué, des réflexions émergent sur le régime de la location en meublé. 

Pour rappel, un logement peut être loué nu ou faire l’objet d’un bail en meublé. Au-delà de différences juridiques (durée du contrat, équipements…), la distinction entre les deux modes de location s’opère sur le plan fiscal. Les revenus fonciers issus de la location nue sont déterminés à partir du régime micro-foncier (abattement de 30% plafonné) ou du régime réel permettant de déduire les charges afférentes au bien loué. L’assiette ainsi établie est soumise au barème progressif de l’impôt sur le revenu (jusqu’à 45 %), aux prélèvements sociaux (17,2 %) et éventuellement à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (jusqu’à 4 %). 

Dans le cadre de la location en meublé non professionnel, les taux d’imposition sont les mêmes que ceux applicables aux revenus fonciers. La différence se trouve dans l’établissement de l’assiette de l’impôt. Avec le régime micro-BIC, le loueur en meublé bénéficie d’un abattement plafonné de 50 % (location à l’année) ou de 71 %, là aussi plafonné, pour la location de meublés de tourisme classés et de chambres d’hôtes. Le bailleur peut être soumis de plein droit ou sur option au régime réel. Outre les charges pouvant être déduites, il pourra amortir le bien, ce qui réduit mécaniquement l’assiette imposable. En cas de revente du bien, il n’est pas tenu compte des amortissements pour le calcul de la plus-value, la plus-value est totalement exonérée après 30 années de détention.

Fiscalement, le propriétaire d’un bien est donc incité à louer celui-ci en meublé à l’année voire à opter pour de la location saisonnière dont le rendement est plus important et l’imposition plus faible. Le rapport Mattei – Sansu, du nom de deux députés, relatif à la fiscalité patrimoniale suggère de supprimer ces avantages. 

Pendant les travaux parlementaires, plusieurs amendements inquiétants avaient été soumis et adoptés par les députés. L’un proposait un alignement de la fiscalité de la location en meublé avec celle des revenus fonciers. Un autre proposait de conserver le régime d’amortissements de la location en meublé et de modifier le calcul de la plus-value. Dans la proposition, celle-ci était calculée à partir de la valeur nette comptable du bien, c’est-à-dire de la valeur d’acquisition déduction faite des amortissements pratiqués. 

Dans sa version adoptée en application de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, seule la location saisonnière classée est affectée. Le Gouvernement a choisi de pénaliser les loueurs de courte durée dans les zones tendues en ramenant l’abattement applicable de 71 à 50 %. Dans les zones non-tendues (zones rurales) l’abattement reste fixé à 71 %.  

Faut-il s’attendre à de nouvelles évolutions dans les années à venir ? Si une unification de la fiscalité sur les revenus locatifs, quel que soit le mode de location, serait bienvenue, il serait regrettable qu’elle prenne pour dénominateur commun l’imposition confiscatoire des revenus fonciers. 

Le corollaire pourrait se trouver dans la proposition du député Jean-Paul Mattei qui suggère la création d’un statut d’investisseur immobilier (recommandation n°20), les revenus locatifs seraient soumis à la flat tax sous conditions. Resteraient à définir l’assiette, le taux et les conditions d’éligibilité à ce statut.

La situation du marché locatif n’est sans doute pas étrangère à l’étranglement juridique et fiscal des bailleurs.  

Alexandre Feuilleuse
Ingénieur Patrimonial
Rédigé le 23 novembre 2023

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