La taxe « rentiers » : où en est-on ?
Fin 2017, la mise en place de la Cotisation Subsidiaire Maladie (CSM) a fait grand bruit pour ceux qui ne l’avaient pas anticipée, sa mise en place étant passée inaperçue… jusqu’à ce que les appels de cotisation émis par l’Urssaf ne soient déposés dans les boites aux lettres des assujettis.
Les règles actuelles
Toute personne qui réside en France de manière stable et régulière bénéficie d’une couverture santé. Pour la financer, une cotisation est automatiquement due dès lors que certains critères, cumulatifs, sont remplis :
– Critères concernant les revenus d’activité :
– L’assuré et son conjoint ou partenaire de Pacs ne perçoivent aucun revenu de remplacement (retraite, rente, allocation chômage) ;
– Ou leurs revenus d’activité restent inférieurs à 20 % du Plafond de la Sécurité Sociale (PASS).
– Critères concernant les revenus du patrimoine : l’assuré et son conjoint ou partenaire de Pacs perçoivent des revenus de leur patrimoine supérieurs à 50 % du PASS.
Ainsi, compte tenu d’un PASS pour 2023 de 43 992€, seront assujettis les personnes qui perçoivent moins de 8 798€ de revenus professionnels et plus de 21 996€ de leur patrimoine.
Notons que la cotisation est individuelle, dès lors que l’assuré et son conjoint ou partenaire de Pacs remplissent les conditions et sont donc éligibles à la cotisation : chacun recevra son appel de cotisation.
Depuis 2019, la cotisation est déterminée :
– En limitant l’assiette des revenus retenus à 8 PASS, soit 351 936€.
– Les revenus pris en compte sont ceux du patrimoine : à savoir les revenus fonciers, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values de cession, les revenus des travailleurs non-salariés qualifiés de « non professionnels ».
– En appliquant un taux dégressif allant de 6,5% à 0%, après réduction l’assiette par un abattement de 50% du PASS (pour chaque contribuable puisque cette cotisation est individuelle !).
– Ainsi, plus les revenus professionnels sont proches du seuil limite d’assujettissement (pour rappel 20% du PASS, soit 8 798€), plus faible sera la cotisation.
Attention : une fois identifiés, les assujettis reçoivent leur appel à cotisation l’année qui suit la perception des revenus puisque l’Urssaf va s’appuyer sur la déclaration des revenus pour établir la contribution… Il est trop tard pour réagir : il faut donc anticiper certaines situations qui pourraient vous « priver » de revenus professionnels.
Des contentieux toujours en cours
Pour rappel, jusqu’à il y a 5 ans, la cotisation au titre de cette Protection Universelle Maladie (PUMa) n’était pas d’application automatique.
Les personnes ne pouvant bénéficier de l’assurance maladie obligatoire bénéficiaient d’une Couverture Maladie Universelle (CMU) leur permettant l’accès aux soins et au remboursement de ces soins.
La taxe PUMa a remplacé la CMU en 2016 : elle est le résultat d’une réforme motivée à la fois par une volonté de simplifier les démarches mais également la volonté d’éviter les ruptures de droits en cas de perte d’activité ou de changement de situation professionnelle. Mais là où la réforme se voulait simplificatrice, nombreux se sont découverts assujettis en recevant par courrier leur appel à cotisation fin 2017 basée sur leurs revenus 2016.
Et nombreux ont été les recours déposés en contestation de cette procédure jugée abusive. Plusieurs points ont été soulignés, nous en citerons plus particulièrement deux :
– Les revenus du patrimoine sont déjà assujettis aux prélèvements sociaux : la CSG concourt déjà à financer l’assurance maladie des propriétaires.
– L’assiette des revenus pris en compte : l’absence de plafonnement dans sa version d’origine pouvait conduire à une disproportion de cette cotisation sociale et certains l’ont considérée comme confiscatoire.
La réponse de l’administration fut rapide : une réforme est venue modifier les modalités de calcul de la cotisation et dès 2019, l’assiette a été assortie d’un plafond pour la prise en compte des revenus, ainsi qu’une réduction du taux applicable assorti d’une dégressivité (à l’origine seul un taux unique de 8% venait à s’appliquer, quelle que soit la situation des assujettis).
En la plafonnant à environ 21,5K€, la cotisation en est-elle devenue « plus acceptable » ?
Nous ne pouvons que constater que l’éligibilité à cette cotisation est devenue systématiquement étudiée dans de nombreux cas de figure.
Par exemple, et de façon évidente, une personne qui souhaite « changer de vie » comme beaucoup ont souhaité le faire ces dernières années, doit procéder à des arbitrages importants dans ses actifs, professionnels ou personnels : à cette occasion, il convient d’être particulièrement vigilant et se ménager une source de revenus professionnels si on souhaite éviter que cette cotisation ne soit assise sur les revenus issus des arbitrages de son patrimoine (plus-values lors de la cession de son entreprise ou d’un portefeuille de valeurs mobilières à fortes plus-values latentes, complément de prix, revenus de capitaux mobiliers, cessions de biens immobiliers générant des plus-values imposables…).
De même, et de façon étonnante, dans la version applicable depuis 2019, nos étudiants sont devenus éligibles à cette cotisation : il convient là encore d’anticiper la situation au regard de cette cotisation quand leurs parents souhaitent les gratifier par des donations d’une partie de leur patrimoine source de revenus… ils pourraient y avoir là aussi des effets « pervers » à cette transmission…
Prenez garde, ce n’est pas parce que le PUMa a été mis en cage qu’il ne peut plus mordre !
Laure Varastet
Ingénieur Patrimonial
Rédigé le 15 juin 2023