Le don sur succession : une solution pour réduire vos droits de succession tout en prolongeant l’action philanthropique d’un proche
La loi du 1er août 2003, relative au mécénat, aux associations et aux fondations s’inscrivait dans une large réforme qui visait à combler le retard de la France en matière d’incitations fiscales au don. Son objectif premier était de favoriser le mécénat des entreprises et des particuliers.
Pour les particuliers, cette loi est venue majorer le taux de la réduction d’impôt sur le revenu de 50 % à 66 % ; voire 75 % dans certains cas, plafonnée à 20 % du revenu imposable (en lieu et place de 10 % auparavant). Cette réduction d’impôt sur le revenu est reportable sur 5 ans en cas d’excédent de versement. La France dispose dès lors d’un régime comparable à celui de la plupart des pays étrangers en matière de plafonnement, tout en offrant un taux de réduction d’impôt supérieur à la moyenne.
Par ailleurs, le Gouvernement de l’époque a complété les dispositifs existants d’incitations fiscales aux dons réalisés du vivant du donateur par un mécanisme d’incitation fiscale post décès. Il a ainsi introduit le dispositif de « don sur succession », que nous proposons de vous présenter ici.
De quoi s’agit-il ?
En tant qu’héritier, donataire ou légataire, si vous bénéficiez d’un bien en pleine propriété et que pour différentes raisons, vous souhaitez vous en dessaisir au profit d’une cause qui vous est chère ; qu’il s’agisse par exemple d’un souhait personnel, de la volonté de rendre hommage à la personne décédée, de raisons familiales, du coût fiscal attaché au bien ou encore de son illiquidité (notamment pour acquitter les droits de succession), le « don sur succession » prévu à l’article 788 du CGI peut répondre à vos attentes.
Il permet, sous conditions, de bénéficier d’un abattement sur l’assiette imposable aux droits de succession, sans remettre en cause les abattements personnels de droit commun. Le bien sortant de la succession nette taxable, vous serez « exonéré » des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) sur la valeur des biens abandonnés.
Quelles sont les conditions d’application ?
– Le don doit être effectué en pleine propriété, au plus tard dans les 12 mois suivant le décès ;
– D’abord réservé aux fondations reconnues d’utilité publique, il a ensuite été étendu aux associations reconnues d’utilité publique, à l’Etat et ses collectivités territoriales ainsi qu’aux établissements publics. En revanche les fonds de dotation ne sont pas éligibles (le III de l’article 788 du code général des impôts énumère de manière limitative les organismes bénéficiaires des dons).
Quels sont les types de dons éligibles ?
– Pour les dons effectués au profit d’une fondation reconnue d’utilité publique : il peut s’agir de dons de somme d’argent ou de libéralité en nature (immeuble, œuvre d’art, etc).
– Pour les dons effectués aux autres organismes (association reconnue d’utilité publique, Etat, collectivités territoriales et leurs établissements publics) : seuls sont pris en compte les dons de somme d’argent ;
Quel est l’avantage fiscal pour votre don sur succession ?
Le montant de l’abattement correspond à la valeur nominale du don, dans le cas d’une somme d’argent, ou à la valeur du bien remis à l’organisme bénéficiaire et évalué à la date du décès, dans l’hypothèse d’un don en nature.
L’abattement n’est ni cumulable avec la réduction d’impôt sur le revenu prévu à l’article 200 du code général des impôts, ni avec la réduction d’IFI relevant elle des dispositions de l’article 978 du même code.
Un exemple :
Madame X. perçoit des revenus annuels de 150 K€.
Par ailleurs, elle a été désignée légataire universelle d’un ami au titre d’un héritage net imposable de 200 K€, composé à 50 % de biens immobiliers.
– Droits de succession dus en principe : environ 120 K€ (taxation à 60 % sans lien de parenté), soit un net perçu de 80 K€ (pas d’abattements personnels applicables sans lien de parenté).
– Ne souhaitant pas entretenir le patrimoine immobilier, notamment car il se situe loin de son domicile, Madame X réalise une donation du bien immobilier à une fondation reconnue d’utilité publique, dans l’année du décès :
– Montant donné : 100 K€ en franchise de droits de donation et sans réduction d’impôt possible ;
– Montant des droits de succession restant dus : 60 K€ (60 % * 100 K€), soit un net perçu de 40 K€.
Si Madame X reçoit la succession puis réalise un don de 100 K€, elle bénéficie d’une réduction maximale d’impôt sur le revenu de 66 % du montant du don (66 000€). Il resterait alors un enrichissement net de (200K€ – 120 K€ – 100 K€ + 66 000 K€) = 46 K€, sous réserve du plafonnement de l’avantage à 20 % du revenu annuel. Mais il aura fallu pouvoir préalablement régler les droits de succession dans les 6 mois du décès de son ami.
Par ailleurs, en cas de donation d’un bien immobilier, si le décès intervient en fin d’année N et la donation en N+1, l’héritier donateur pourrait être assujetti à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) sur le bien selon la valeur de son patrimoine immobilier et redevable des impôts locaux.
Ainsi, l’avantage relatif du dispositif par rapport à une réduction d’impôt sur le revenu dont pourrait bénéficier l’héritier s’il effectuait le don une fois la succession liquidée, dépend en pratique de nombreux paramètres. Parmi lesquels figurent les taux de taxation du contribuable (au titre de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur la fortune immobilière, des impôts locaux), le montant de l’héritage et les taux de droits de succession à acquitter sur les sommes susceptibles d’être versées.
N’hésitez pas à consulter votre banquier privé ou l’ingénierie patrimoniale de ODDO BHF Banque Privée à ce sujet, nous pourrons vous accompagner sur la solution à retenir en fonction de votre situation familiale et patrimoniale.
Ingénieur Patrimonial
Rédigé le 25 mai 2023